NOTE INTERMINISTERIELLE n° DAP/DGT/2025/167 du 31 juillet 2025 relative aux modalités d’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en matière de santé et de sécurité dans les activités de travail en détention

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NOTE INTERMINISTERIELLE n° DAP/DGT/2025/167 du 31 juillet 2025 relative aux modalités d’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en matière de santé et de sécurité dans les activités de travail en détention

Le directeur de l’administration pénitentiaire
Le directeur général du travail

à

Mesdames et Messieurs les directeurs interrégionaux des services pénitentiaires
Mesdames et Messieurs les directeurs régionaux de l'économie,
de l'emploi, du travail et des solidarités

RéférenceNOR : JUSK2521049N
Date de signature31 juillet 2025
EmetteursLe directeur de l’administration pénitentiaire
Le directeur général du travail
ObjetModalités d’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en détention.
Contacts utilestravail-prison@justice.gouv.fr
dgt-sat@travail.gouv.fr
Nombre de pages et annexes12 pages et 2 annexes (total de 15 pages)
Mention Outre-merLe texte s’applique dans les départements et régions d’outre-mer, ainsi que dans les collectivités d’outre-mer.
Mots-clésTravail pénitentiaire, travail en détention, personne détenue exerçant une activité de travail en détention, établissement pénitentiaire, santé et sécurité au travail, chef de l’établissement pénitentiaire, donneur d’ordre, agents de contrôle de l’inspection du travail, droit d’entrée, correspondances sous pli fermé, présentation de documents.
Textes de référenceSection 5 du Chapitre II du Titre Ier du Livre IV du code pénitentiaire ; 
Circulaire du 9 juin 2011 d’application des articles 4, 39 et 40 de la loi n°2009-1439 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, relatifs à la correspondance téléphonique et à la correspondance écrite des personnes détenues, prise en application de la loi n°2009-1439 du 24 novembre 2009 pénitentiaire ;
Circulaire du 18 juillet 2022 relative à l’organisation du travail en détention.
Circulaire / instruction abrogéeCirculaire n° 99-102 du 16 juillet 1999 relative aux modalités d'intervention des services de l'inspection du travail en matière d'hygiène et de sécurité du travail et de la formation professionnelle des détenus.
Date d’applicationImmédiate
Document opposableOUI
Publiée au BOOUI

La réforme du travail pénitentiaire, portée par la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire du 22 décembre 2021[1], a pour objectif de rapprocher les conditions du travail exercé par les personnes détenues de celles du travail en milieu libre, en renforçant notamment la protection de leur santé et de leur sécurité au travail.

Pour servir cet objectif, le ministère de la Justice et le ministère chargé du Travail ont collaboré à renforcer l’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en détention, afin de garantir le respect des règles de santé et de sécurité au travail pour les personnes détenues exerçant une activité de travail sous le régime du contrat d’emploi pénitentiaire. A ce titre, l’ordonnance relative aux droits sociaux des personnes détenues[2], ainsi que le décret relatif à la santé et à la sécurité dans les activités de travail et à l’inspection du travail en détention du 3 janvier 2025[3], sont venus encadrer ce dispositif renouvelé.

Le dispositif a vocation à s’appliquer sur l’ensemble du territoire national français, métropolitain et ultra-marin.

Afin de permettre sa mise en œuvre dans les meilleures conditions, la présente note précise le cadre juridique applicable en matière de santé et de sécurité dans les activités de travail en détention (I), les modalités d’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en détention (II), ainsi que les prérogatives qui leur sont confiées dans le cadre du travail pénitentiaire (III).

I. Cadre juridique de la santé et la sécurité au travail des personnes détenues exerçant une activité de travail sous le régime du contrat d’emploi pénitentiaire

Le travail pénitentiaire s’effectue dans le cadre d’un contrat d’emploi pénitentiaire, conclu entre la personne détenue et un donneur d’ordre proposant une activité de travail en détention. Le donneur d’ordre varie selon les régimes de travail (Annexe n° 2). Il peut être :

- l’administration pénitentiaire : pour les personnes détenues travaillant dans le cadre du service général[4] ;
- une structure extérieure implantée en détention, de droit privé ou de droit public[5] : pour les personnes détenues travaillant dans le cadre des activités de production[6].

Les règles en matière de santé et de sécurité au travail s’appliquent aux activités de travail organisées en détention, sous réserve des adaptations prévues par le code pénitentiaire[7].

S’agissant des activités de production, le code pénitentiaire définit le partage des responsabilités en matière de santé et de sécurité au travail entre le chef de l’établissement pénitentiaire et le donneur d’ordre[8] :

- Le chef de l’établissement pénitentiaire est garant de la sécurité, de l’hygiène et de la salubrité des lieux dans lesquels les personnes détenues exercent leur activité de travail.
- Le donneur d’ordre veille notamment à assurer aux personnes détenues les actions de formation et d’information nécessaires à garantir leur santé et leur sécurité au travail. Il s’assure également de l’aménagement des postes de travail des personnes détenues qu’il emploie et de la bonne utilisation des équipements de travail et des moyens de protection appropriés à l’activité de travail.

Cette répartition est rappelée et, si nécessaire, précisée dans le contrat qui lie le donneur d’ordre à l’établissement pénitentiaire et encadre l’activité de travail proposée en détention. Ce document varie en fonction du donneur d’ordre en charge de l’atelier de travail pénitentiaire :

- Une convention de production pour l’Atigip (service de l’emploi pénitentiaire) ;
- Un marché de gestion déléguée pour les prestataires de gestion déléguée ou un contrat de partenariat pour les partenaires privés intervenant dans le cadre d’un contrat de partenariat public-privé ;
- Un contrat d’implantation pour les autres structures de droit privé ou de droit public implantées au sein d’un atelier de travail pénitentiaire.

II. Modalités d’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en milieu pénitentiaire

Les agents de contrôle de l’inspection du travail sont compétents pour veiller à l’application et au respect des dispositions relatives à la santé et la sécurité des personnes détenues exerçant une activité de travail en détention, telles que définies dans le code pénitentiaire. Ils peuvent également être amenés à s’enquérir du respect de ces règles s’agissant des activités de formation professionnelle se déroulant à l’intérieur de l’établissement pénitentiaire.

L’ordonnance relative aux droits sociaux des personnes détenues et ses décrets d’application ont permis de renforcer les modalités d’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en détention. Leur intervention fait néanmoins l’objet de certaines adaptations liées aux spécificités du contexte carcéral, s’agissant notamment des modalités d’accès à l’établissement pénitentiaire (A) et de communication avec les personnes détenues (B).

En Polynésie française, l’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail en détention est par ailleurs subordonnée à la conclusion d’une convention entre le haut-commissaire et le président de la Polynésie française[9]. En Nouvelle-Calédonie, une convention conditionnant l’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail doit également être conclue entre le haut-commissaire et le président du gouvernement ou de l’assemblée de province[10][11].

A. Modalités d’accès des agents de contrôle de l’inspection du travail aux établissements pénitentiaires

Les agents de contrôle de l’inspection du travail disposent d’un droit d’entrée dans les établissements pénitentiaires où une activité de travail est exercée par des personnes détenues, au service général ou en production, afin d’y contrôler le respect des règles de santé et de sécurité au travail. Ils y assurent des missions de surveillance et d’enquêtes[12]. Ils peuvent choisir d’avertir ou non l’établissement pénitentiaire de leur visite.

Le chef de l’établissement pénitentiaire peut également solliciter de lui-même l’intervention des agents de contrôle de l’inspection du travail, afin qu’ils apprécient le respect des règles de santé et de sécurité dans les activités de travail au sein de son établissement[13].

Pour accéder à l’établissement pénitentiaire, les agents de contrôle de l’inspection du travail doivent justifier de leur qualité, en présentant leur carte professionnelle, et se soumettre aux mesures réglementaires de contrôle et de sécurité pour pouvoir entrer en détention. Ils doivent également être en mesure de présenter une carte nationale d’identité ou un passeport afin de décliner leur identité.

En raison des contraintes liées à la sécurité, ils ne peuvent pas accéder aux établissements pénitentiaires munis de téléphones portables, appareils photographiques, ou tout autre équipement permettant d’effectuer des enregistrements audio ou vidéo.

Le chef de l’établissement pénitentiaire accorde sans délai l’accès à l’établissement aux agents de contrôle de l’inspection du travail. Il peut être fait exception à ce principe par le chef de l’établissement pénitentiaire pour des motifs liés au bon ordre et à la sécurité de l’établissement pénitentiaire[14]. Le chef de l’établissement pénitentiaire en informe alors directement et immédiatement les agents de contrôle de l’inspection du travail, en justifiant des circonstances particulières ayant conduit à ce refus. Les agents de contrôle de l’inspection du travail pourront faire valoir leur droit d’entrée au sein de l’établissement pénitentiaire dès que les conditions permettant d’assurer le bon ordre et la sécurité seront à nouveau réunies. Un refus d’accès ne peut en aucun cas être justifié au motif que les agents de contrôle de l’inspection du travail n’ont pas préalablement averti l’établissement pénitentiaire de leur visite.

Les agents de contrôle de l'inspection du travail sont accompagnés, au cours de leurs visites, par le chef de l'établissement pénitentiaire ou son représentant, ainsi que par un membre du personnel pénitentiaire en charge de l’activité de travail. Ils disposent d’un accès à l’ensemble des lieux où s’effectuent les activités de travail, signalés en amont par le chef de l’établissement pénitentiaire ou son représentant.

Sous réserve des considérations de bon ordre et de sécurité de l'établissement pénitentiaire, et si l'agent de contrôle de l'inspection du travail en fait la demande, le chef de l'établissement pénitentiaire est invité à lui permettre d'interroger les personnes détenues exerçant une activité de travail en détention dans des conditions permettant la confidentialité des échanges[15].

Pour faciliter le travail des services de contrôle de l’inspection du travail, le chef de l'établissement pénitentiaire adresse, chaque année, au directeur départemental du travail, de l'emploi, des solidarités (et de la protection des populations) (DDETS(PP)), la liste complète et actualisée des activités de travail de son établissement.

Il est également conseillé que le DDETS(PP) transmette régulièrement au chef de l’établissement pénitentiaire les coordonnées des agents de l’inspection du travail territorialement compétents, ainsi que la copie de leur carte nationale d’identité ou de leur passeport. De même, un agent de contrôle de l’inspection du travail peut décider de transmettre une copie de ses documents d’identité en amont de sa visite. Ces démarches anticipées et facultatives permettent à l’établissement pénitentiaire d’anticiper au mieux l’instruction de l’autorisation d’accès des agents concernés. Cette pratique ne peut en aucun cas remettre en cause le droit d’entrée conféré aux agents de contrôle de l’inspection du travail.

B. Modalités de communication entre les personnes détenues et les agents de contrôle de l’inspection du travail dans le cadre des correspondances sous pli fermé

Les personnes détenues disposent d’un droit de correspondance avec les agents de contrôle de l’inspection du travail[16]. Les correspondances échangées avec une autorité administrative, tels que les agents de contrôle de l’inspection du travail, ne peuvent être ni contrôlées ni retenues. Par conséquent, les personnes détenues et les agents de contrôle de l’inspection du travail échangent par correspondances sous pli fermé[17].

La correspondance écrite est remise fermée, avec le rabat de l’enveloppe collé, par la personne détenue expéditrice. Il est préconisé d’enregistrer la correspondance sur un registre prévu à cet effet, tenu par les services du vaguemestre, sous la responsabilité du chef de l’établissement pénitentiaire. La correspondance acquiert un caractère protégé dès lors que le nom et la qualité du destinataire, ainsi que l’adresse de l’expéditeur et l’adresse du destinataire, sont inscrits lisiblement sur l’enveloppe, permettant sans équivoque aux services du vaguemestre de l’établissement pénitentiaire de savoir que la correspondance est destinée ou provient des agents de contrôle de l’inspection du travail. En conséquence, la correspondance écrite protégée ne pourra pas être ouverte par les services du vaguemestre de l’établissement avant sa remise à son destinataire[18].

Les signalements effectués par les personnes détenues qui interviennent sur le champ de compétence de l’inspection du travail en matière de santé et de sécurité au travail des personnes détenues sont qualifiés de « plaintes ». Le principe de confidentialité des plaintes interdit aux agents de contrôle de l’inspection du travail de révéler l’identité du plaignant qui les a saisis et de permettre l’identification de la source de cette plainte. Ce principe a pour objet d’assurer la protection des personnes détenues exerçant une activité de travail. Sur la base de ces plaintes, les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent mettre en œuvre l’ensemble des missions de contrôle précisées par la présente note.

Dans le cas où les agents de contrôle de l’inspection du travail seraient destinataires d’un signalement ne relevant pas de leur champ de compétence en matière de santé et de sécurité au travail des personnes détenues, ils en informent la personne détenue à l’origine du signalement, et la réorientent, dans la mesure du possible, vers l’autorité compétente.

Lorsque les agents de contrôle de l’inspection du travail sont destinataires de faits relevant d’un crime ou d’un délit, ils sont nécessairement tenus d’aviser le procureur de la République sans délai, et de lui transmettre tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs[19].

III. Prérogatives des agents de contrôle de l’inspection du travail en milieu pénitentiaire

Dans le cadre de leurs missions, les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent demander à se faire présenter les documents relatifs à la santé et la sécurité dans les activités de travail en détention (A). Le contrôle qu’ils exercent aboutit ensuite à la mise en œuvre d’une procédure déterminée en fonction des situations (B).

A. Présentation aux agents de contrôle de l’inspection du travail de documents relatifs à la santé et la sécurité dans les activités de travail en détention

Seuls les documents dont la tenue à la disposition des agents de contrôle de l’inspection du travail est rendue obligatoire par une disposition légale ou réglementaire, en matière de santé et de sécurité au travail, doivent être présentés, à leur requête, aux agents de contrôle de l’inspection du travail.

Les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent ainsi se faire présenter les livres, registres ou documents rendus obligatoires par le code du travail[20] dès lors qu’ils sont prévus par une disposition de la quatrième partie du code du travail applicable en détention, ainsi que les documents intéressant la santé et la sécurité au travail des personnes détenues visées par le code pénitentiaire[21].

Par exemple, sont concernés :

- Le document unique d’évaluation des risques professionnels de l’établissement pénitentiaire ;
- Le contrat d’implantation, la convention de production, la convention de partenariat ou le marché de gestion déléguée conclu entre l’établissement pénitentiaire et le donneur d’ordre ;
- Le registre de sécurité (par exemple, les rapports de vérifications périodiques ; les rapports de vérification d'installations électriques, de ventilation, d'équipements de travail ; les carnets de maintenance ; etc.)[22]

En revanche, les dispositions du code pénitentiaire ne prévoient pas l’équivalent du droit de communication renforcée au bénéfice des agents de contrôle de l’inspection du travail instauré par le code du travail[23]. De même, les informations relatives à la rémunération des personnes détenues qui exercent une activité de travail sont exclues de l’obligation de présentation de documents relatifs à la santé et la sécurité au travail aux agents de contrôle de l’inspection du travail.

Sont visés par l’obligation de tenue à disposition des documents relatifs à la santé et la sécurité au travail :

- Au service général, le chef de l’établissement pénitentiaire ;
- En production, le chef de l’établissement pénitentiaire et le donneur d’ordre, conformément au partage des responsabilités en matière de santé et de sécurité au travail prévu par le code pénitentiaire et le contrat d’implantation.

En pratique et afin de tenir compte de l’objectif de responsabilisation des donneurs d’ordre et de la circonstance que le représentant légal du donneur d’ordre n’est pas toujours présent sur les lieux de détention, le chef de l’établissement pénitentiaire joue un rôle de facilitation dans la mise en œuvre de cette obligation : sensibilisation et rappel de ses obligations auprès du donneur d’ordre, mise à disposition d’un lieu de conservation des documents.

 B. Suites données à la procédure de contrôle

      1. A destination du chef de l’établissement pénitentiaire

          a) Intervention sur sollicitation du chef de l’établissement pénitentiaire

L'intervention des agents de contrôle de l'inspection du travail, réalisée à la demande du chef de l’établissement pénitentiaire[24], donne lieu à un rapport, indiquant s’il y a lieu les manquements en matière de santé et de sécurité, ainsi que les mesures de nature à remédier à la situation.

Une copie du rapport est communiquée par le chef de l'établissement pénitentiaire :

- pour les activités de travail en production : aux responsables des structures donneuses d’ordre et à la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) ;
- pour les activités de travail du service de l’emploi pénitentiaire (SEP) : au chef d’atelier et au chef du service de l’emploi pénitentiaire de l’Atigip ;
- pour les activités de formation professionnelle : à l’organisme de formation compétent.

Le chef de l'établissement pénitentiaire adresse une réponse aux agents de contrôle de l’inspection du travail dans les deux mois à compter de la réception du rapport, en précisant les mesures prises ou à prendre, accompagnées d’un calendrier de réalisation. Lorsque la situation de travail présente un risque grave et imminent pour la santé ou la sécurité des personnes détenues au travail, ce délai est ramené à quinze jours.

En cas de désaccord sur la nature ou le calendrier de ces mesures, les agents de contrôle de l'inspection du travail en réfèrent au directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités qui saisit le directeur interrégional des services pénitentiaires compétent. Ce dernier fait connaître sa réponse dans un délai d'un mois.

Si les observations des agents de contrôle de l’inspection du travail portent à la connaissance du chef de l’établissement pénitentiaire des manquements persistants du donneur d’ordre à ses obligations contractuelles ou légales, le chef de l’établissement pénitentiaire peut résilier le contrat d’implantation, sous réserve de respecter la procédure de mise en demeure préalable[25], prévoyant notamment la mise en conformité immédiate des outillages, des installations, des procédures et des équipements de travail.

Par ailleurs, si les observations des agents de contrôle de l’inspection du travail portent à la connaissance du chef de l’établissement pénitentiaire une situation de danger grave et imminent pour la vie ou la santé des personnes détenues exerçant une activité de travail pour le compte de l’administration pénitentiaire, le chef de l’établissement pénitentiaire est invité à suspendre l’activité de travail pour motif lié au maintien du bon ordre et de la sécurité de l’établissement.

         b) Intervention à l’initiative des agents de contrôle de l’inspection du                   travail

Dans le cas où les agents de contrôle de l’inspection du travail interviennent à leur initiative, ils peuvent conseiller le chef de l’établissement pénitentiaire en rédigeant un rapport, indiquant s’il y a lieu les manquements en matière de santé et de sécurité, ainsi que les mesures de nature à remédier à la situation. Ce rapport est transmis au chef de l’établissement pénitentiaire et à la DISP territorialement compétente.

     2. A destination du donneur d’ordre dans le cadre d’une activité             de travail en production

           1.1. Moyens juridiques

A l’égard du donneur d’ordre, les agents de contrôle de l’inspection du travail ont la possibilité de mobiliser les moyens juridiques suivants : 

             a) Constater les infractions à la réglementation sur la santé et la sécurité au                      travail en détention par des procès-verbaux ;

Les agents de contrôle de l’inspection du travail intervenant au sein d’un établissement pénitentiaire sont chargés de veiller au respect des dispositions de la quatrième partie du code du travail applicables en détention, ainsi qu’aux dispositions de la section 5 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code pénitentiaire relatives au travail en détention.

Ils sont également chargés de constater, concurremment avec les officiers de police judiciaire, les infractions au régime du travail en ce qu’elles concernent la santé et la sécurité au travail des personnes détenues. En effet, le code pénitentiaire prévoit que les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent relever par procès-verbal les infractions aux règles de santé et de sécurité commises par le donneur d’ordre de droit privé s’agissant du travail en production[26].

- Cas de la mise en demeure préalable au procès-verbal :

Dans certaines hypothèses, les agents de contrôle de l’inspection du travail doivent mettre en demeure[27] le donneur d’ordre de se conformer aux mesures de santé et de sécurité au travail en détention, avant de pouvoir dresser procès-verbal[28].

Lorsque cette procédure est prévue, les agents de contrôle de l’inspection du travail ne peuvent dresser immédiatement procès-verbal (sans mise en demeure préalable), que lorsque les faits qu’ils constatent présentent un danger grave ou imminent pour l’intégrité physique des personnes détenues exerçant une activité de travail en détention[29]. Cette procédure spéciale constitue un préalable à l’engagement de poursuites pénales.

Les agents de contrôle de l’inspection du travail fixent le délai d’exécution de la mise en demeure en vertu des délais prévus par le code du travail[30]. Ces délais minimums réglementaires varient de 8 jours à 3 mois. Par exemple, en matière d’application des règles relatives aux conditions d’utilisation des équipements de protection individuelle, le délai minimum d’exécution de la mise en demeure est de 8 jours.

- Cas de la mise en demeure préalable à l’arrêt temporaire d’activité :

Lorsque les agents de contrôle de l’inspection du travail constatent qu’une personne détenue exerçant une activité de travail en détention est exposée à un agent chimique cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction et qu’elle se trouve dans une situation dangereuse suite au dépassement d’une valeur limite d’exposition professionnelle, à un défaut ou à l’insuffisance de mesures et moyens de prévention, ils peuvent mettre le donneur d’ordre en demeure de remédier à cette situation.

Cette mise en demeure se déroule en deux étapes :

- Une demande de communication par écrit, dans les quinze jours, d’un plan d’action contenant les mesures correctives appropriées que le donneur d’ordre prend en vue de remédier à la situation dangereuse, à laquelle est joint un calendrier prévisionnel de leur mise en œuvre ;
- A l’issue d’un délai de 15 jours pour examiner le document transmis, la mise en demeure d’exécuter ce plan d’action avec d’éventuelles observations.

A défaut de réception du plan d’action ou à l’issue du délai fixé par la mise en demeure, si les agents de contrôle de l’inspection du travail constatent que la situation dangereuse perdure, ils peuvent ordonner l’arrêt temporaire de l’activité[31].

- Cas des demandes de vérifications, de mesures et d’analyses :

Les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent demander au donneur d’ordre :

- de faire procéder à des contrôles techniques consistant à faire vérifier l’état de conformité de ses installations et équipements ;
- de faire procéder à la mesure de l’exposition des personnes détenues exerçant une activité de travail en détention à des nuisances physiques, à des agents physiques, chimiques ou biologiques donnant lieu à des limites d’exposition ;
- de faire procéder à l’analyse de toutes matières, y compris substances, mélanges, matériaux, équipements, matériels ou articles susceptibles de comporter ou d’émettre des agents physiques, chimiques ou biologiques dangereux pour les personnes détenues exerçant une activité de travail en détention[32].

             b) Prendre les mesures et procédures d’urgence ;

-  Cas des arrêts temporaires de travaux ou d’activité :

Les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent prendre toutes mesures utiles visant à soustraire immédiatement une personne détenue exerçant une activité de travail en détention d'une situation de danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, notamment en prescrivant l'arrêt temporaire de la partie des travaux ou de l'activité en cause, lorsqu'ils constatent que la cause du danger résulte d’une situation prohibée[33].

Si la situation dangereuse persiste, à l’issue du délai fixé dans une mise en demeure, les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent ordonner l’arrêt temporaire de l’activité concernée[34]. En cas d’arrêt temporaire de l’activité, le contrat d’emploi pénitentiaire et la rémunération de la personne détenue sont maintenus[35].

Lorsque toutes les mesures ont été prises pour faire cesser la situation de danger grave et imminent ou la situation dangereuse ayant donné lieu à un arrêt temporaire de travaux ou d’activité, le donneur d’ordre informe les agents de contrôle de l'inspection du travail. Après vérification, les agents de contrôle de l’inspection du travail autorisent la reprise des travaux ou de l'activité concernée[36].

En cas de contestation par le donneur d’ordre de la réalité du danger ou de la façon de le faire cesser, notamment à l'occasion de la mise en œuvre de la procédure d'arrêt des travaux ou de l'activité, celui-ci saisit le juge administratif par la voie du référé[37].

- Cas du référé judiciaire :

Indépendamment de la mise en œuvre du pouvoir de dresser procès-verbal sans mise en demeure préalable lorsque les faits constatés présentent un risque sérieux d’atteinte à l’intégrité physique des travailleurs, les agents de contrôle de l’inspection du travail ont la faculté de saisir le juge judiciaire statuant en référé pour voir ordonner toutes mesures propres à faire cesser le risque, telles que la mise hors service, l'immobilisation, la saisie des matériels, des machines, des dispositifs, des produits ou autres[38]. Le juge peut également ordonner la fermeture temporaire d'un atelier. Il peut assortir sa décision d'une astreinte qui est liquidée au profit du Trésor.

En cas de fermeture temporaire d’une activité par le juge, le contrat d’emploi pénitentiaire et la rémunération de la personne détenue sont maintenus[39].

             c) Mettre en œuvre une transaction pénale ;

Le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités peut, tant que l’action publique n’a pas été mise en mouvement, transiger avec les donneurs d’ordre n’ayant pas respecté les règles de santé et de sécurité au travail[40]. Sont exclus de cette procédure les délits punis d’une peine d’emprisonnement d’un an ou plus, comme le fait pour le donneur d’ordre, personne morale de droit privé, de ne pas s’être conformé à l’arrêt temporaire de l’activité exigé par les agents de contrôle de l’inspection du travail.

La proposition de transaction est déterminée en fonction des circonstances et de la gravité de l'infraction, de la personnalité du donneur d’ordre, ainsi que de ses ressources et de ses charges. Elle précise le montant de l'amende transactionnelle que le donneur d’ordre devra payer, ainsi que le cas échéant les obligations qui lui seront imposées pour faire cesser l'infraction[41].

Lorsqu'elle a été acceptée par le donneur d’ordre, la proposition de transaction est soumise à l'homologation du procureur de la République.[42]

           1.2. Suites données par le chef de l’établissement pénitentiaire

Le chef de l’établissement pénitentiaire est informé des manquements et infractions constatés[43]. Si les observations des agents de contrôle de l’inspection du travail portent à sa connaissance des manquements persistants du donneur d’ordre à ses obligations contractuelles ou légales, il peut résilier le contrat d’implantation, sous réserve de respecter la procédure de mise en demeure préalable[44], prévoyant notamment la mise en conformité immédiate des outillages, des installations, des procédures et des équipements de travail.


Le directeur de l’administration pénitentiaire,
Sébastien CAUWEL

Le directeur général du travail,
Pierre RAMAIN


[1] Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire.
[2] Ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022 relative aux droits sociaux des personnes détenues.
[3] Décret n° 2025-7 du 3 janvier 2025 relatif à la santé et à la sécurité dans les activités de travail et à l’inspection du travail en détention.
[4] Article L. 412-3, 1° du code pénitentiaire.
[5] Par exemple : entreprise concessionnaire, entreprise adaptée, structure d’insertion par l’activité économique, établissement ou service d’accompagnement par le travail, service de l’emploi pénitentiaire de l’Atigip, prestataire de gestion déléguée, partenaire privé titulaire d’un contrat de partenariat public-privé, collectivité territoriale, etc.
[6] Article L. 412-3, 2°, du code pénitentiaire.
[7] Sous-section 1 de la Section 5 du Chapitre II du Titre Ier du Livre IV du code pénitentiaire.
[8] Ibid.
[9] Article D. 765-9 du code pénitentiaire.
[10] Article D. 775-9 du code pénitentiaire.
[11] Compte tenu des statuts particuliers de ces deux collectivités d’outre-mer, leurs inspections du travail relèvent d’un régime spécifique et ne sont pas soumises à l’autorité de la direction générale du travail.
[12] Articles L. 412-20-4 et D. 134-6 du code pénitentiaire.
[13] Article L. 412-20-10 du code pénitentiaire.
[14] Article L. 6 du code pénitentiaire.
[15] Convention n°81 de l’Organisation International du Travail sur l’inspection du travail.
[16] Article L. 412-20-11 du code pénitentiaire.
[17] Article D. 345-10 du code pénitentiaire.
[18] Circulaire du 9 juin 2011 d’application des articles 4, 39 et 40 de la loi n° 2009-1439 du 24 novembre 2009 pénitentiaire, relatifs à la correspondance téléphonique et à la correspondance écrite des personnes détenues, prise en application de la loi n° 2009-1439 du 24 novembre 2009 pénitentiaire.
[19] Article 40 du code de procédure pénale.
[20] Article L. 8113-4 du code du travail.
[21] Article L. 412-20-6 du code pénitentiaire.
[22] Article L. 4711-5 du code du travail.
[23] Article L. 8113-5 du code du travail.
[24] Article L. 412-20-10 du code pénitentiaire.
[25] Article R. 412-82 du code du travail.
[26] Articles L. 8113-7 et L. 8113-8 du code du travail.
[27] Article L. 4721-4 du code du travail.
[28] Article L. 4721-6 du code du travail.
[29] Article L. 4721-5 du code du travail.
[30] Article R. 4721-5 du code du travail.
[31] Article L. 4721-8 du code du travail.
[32] Article L. 4722-1 du code du travail.
[33] Article L. 4731-1 du code du travail.
[34] Article L. 4731-2 du code du travail.
[35] Article L. 4731-5 du code du travail.
[36] Article L. 4731-3 du code du travail.
[37] Article L. 4731-4 du code du travail.
[38] Article L. 4732-1 du code du travail.
[39] Article L. 4732-3 du code du travail.
[40] Article L. 8114-4 du code du travail.
[41] Article L. 8114-5 du code du travail.
[42] Article L. 8114-6 du code du travail.
[43] Article L. 412-20-9 du code pénitentiaire.
[44] Article R. 412-82 du code pénitentiaire.

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